Faik Konitza

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Règne sans Occupation : Albanie 1945-1948

Luan Dode

Présentation de Ragip Zekolli

L’ouvrage « Règne sans occupation » vient compléter le vide des études de la période 1945-1948 sur l’Albanie et les Albanais et surtout les relations albano-yougoslaves de cette période. C’est une nouveauté, tant pour les lecteurs que pour les professionnels de l’histoire. Luan Dode

L’auteur a consulté de nombreux ouvrages d’archive, une littérature abondante ainsi que des périodiques et des organes de presse de l’époque. L’ouvrage comporte 8 chapitres. L’index des noms propres, des indications géographiques, des institutions et organisations ainsi que l’index thématique facilitent la lecture et témoignent de la rigueur de l’auteur.

Le Comintern autorisait Josip Broz Tito et le Parti Communiste Yougoslave d’aider à la création d’un parti communiste en Albanie. Cette tâche a été confiée à Miladin Popoviç et Dushan Mugosha qui se sont rendus en Albanie. Leur vrai travail apparaît au Plénum du Parti Communiste d’Albanie, le 23-27 novembre 1944. Les délégués yougoslaves Velimir Stojniç et Niaz Dizdareviç y participaient également. Le constat de Stojniç « votre Parti a pris des positions qui ne sont pas claires, comme Mukja, Labinoti, l’attitude envers Muharrem Bajraktari, Abaz Kupi », laisse sous-entendre l’insistance des inspecteurs de Tito sur la guerre civile en Albanie. Dans une lettre à Miladin Popoviç Liri Gega écrivait : « A force de lutter contre les réactionnaires albanais, nous n’avons pas assez de temps pour lutter contre les Allemands. J’ai peur que les partisans oublient la guerre avec les Allemands ». Nous trouvons également ce parfum de guerre civile dans une déclaration d’Enver Hoxha à l’attention des dirigeants communistes : « Soit avec nous, soit contre nous ».

Le chapitre II traite l’attitude envers les Albanais dans leurs territoires en Yougoslavie.

Book coverEn juin 1944, Tito demande à Hoxha d’envoyer deux brigades au Kosovo. Hoxha a ordonné en septembre de la même année l’envoi de la brigade III et IV au Kosovo. Elles avaient pour ordre « d’anéantir sans pitié les nationalistes et les réactionnaires albanais à l’intérieur ou en dehors des frontières, sans la moindre tolérance ».

Le 8 février 1945, Tito ordonne l’installation du régime militaire au Kosovo qui a duré jusqu’en juillet. L’auteur décrit brièvement le massacre de Tivar qui commence avec le voyage des Kosovars non armés et mobilisés de force. Au cours de cette marche, les Kosovars ont été maltraités, terrorisés, massacrés et empoisonnés. 780 Kosovars ont péri pendant la marche de Kukës à Shkodër. 1700 autres à Tivar. Le nombre de morts tout au long de la marche Prizren-Shkodër-Dubrovnik varie entre 2.950 et 3.450.

Le chapitre III analyse l’avènement au pouvoir des communistes albanais. Le 29 novembre a été fixé comme le jour de libération commun pour les deux pays. Le drapeau yougoslave était arboré partout. Tout était dicté par les Yougoslaves, y compris les relations internationales. Au cours de sa visite en Bulgarie, en décembre 1947, Hoxha déclarait que « le peuple albanais n’est pas un peuple slave, mais il est lié comme la chair et l’os avec les peuples slaves ».

Le chapitre IV est consacré aux relations internationales dans le cadre du communisme panslaviste où Tito était le leader. Selon la déclaration de Kardel « le Kosovo serait restitué à l’Albanie, … uniquement quand cette dernière aurait intégré la Fédération yougoslave ». Au cours de sa rencontre avec Staline à Moscou, en 1947, Hoxha n’a pas parlé ni de la situation au Kosovo, ni de la situation à Chameria.

Le chapitre V décrit la proclamation de la République populaire d’Albanie le 11 janvier 1946. La Constitution albanaise était une copie conforme de celle yougoslave.

Le chapitre VI relate la consolidation du pouvoir communiste en Albanie basée sur l’oppression des mouvements de contestation, les tortures, l’élimination des opposants politiques et la terreur sur les institutions religieuses.

Le chapitre VII met le focus sur le processus de la fusion avec la Yougoslavie. Le 23 juin 1946, Hoxha effectue une visite à Belgrade où il a été reçu par Tito. Au cours de son séjour, Hoxha visite la Slovénie mais pas le Kosovo, il signe le Traité d’Amitié et la Convention économique. Hoxha reçoit le titre « Héros des peuples de la Yougoslavie ». Tito a confirmé à Hoxha que Staline aiderait l’Albanie, mais via la Yougoslavie.

Après la visite de Hoxha le 14 juillet 1947 à Moscou, des voix se levaient à l’intérieur du Parti communiste albanais contre les Yougoslaves. Les évènements ont pris une autre tournure. Les Yougoslaves voulaient envoyer des troupes militaires en Albanie. Moscou demandait des explications. Les négociations sur la création d’une fédération panslaviste avec les Bulgares piétinaient. Les représentants yougoslaves au sein du Gouvernement albanais avaient hâte d’acter la fusion avec la Yougoslavie. Hoxha voulait gagner du temps et demandait l’avis de Moscou.

Le 28 juin 1948 éclate le différend Tito-Staline. Le 1er juillet le Comité central du Parti communiste albanais établi un communiqué où il se solidarise avec la position de Moscou et dénonce au passage une tentative yougoslave de réduire l’Albanie à l’état de colonie.

En résumé, cet ouvrage fait une analyse scientifique des relations entre l’Albanie et la Yougoslavie, dans tous les domaines de la vie, au cours de la période 1945-1948. L’ouvrage argumente la visée internationaliste des deux parties de fusionner les deux pays afin de mettre en œuvre la stratégie de l’extension de la politique panslaviste sur tous les Balkans, projet qui avait le soutien de Staline. Or, c’est le conflit Staline-Tito qui a empêché la fusion de l’Albanie et de la Yougoslavie.

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