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Colloque : Au-delà de la vengeance - samedi 27 février 2010

L’asbl Konitza était l’invitée de la « Maison des Cultures » de la commune de Saint-Gilles le samedi 27 février 2010. A cette occasion, le président de l’asbl Konitza, Genti Metaj, a procédé, devant une salle comble, à l’ouverture du colloque : « Le Kanun : au-delà de la vengeance ».

Ce colloque se proposait de faire découvrir un code coutumier parmi les plus méconnus de la culture européenne : le Kanun albanais. Ce code médiéval, dicté par le Prince Lëke Dukagjini au XVe siècle, a régi jusqu’à très récemment tous les aspects de la vie sociale dans le Nord de l’Albanie. Souvent associé à la « reprise du sang », le Kanun propose cependant une alternative au cycle de la vengeance, d’une étonnante modernité : le pardon, conçu comme un rite de réconciliation entre famille ennemies.

Les orateursPour beaucoup, parmi l’assistance non albanaise, ce code pénal séculaire demeurait associé à la vendetta et à une pratique issue du fond des âges. Réactualisée par les médias et strictement fondé sur une donnée sensationnaliste, ce code coutumier, ainsi présenté, renvoie à une représentation grossière des albanais et de leurs cultures. Le colloque se proposait donc d’expliquer les mécanismes de ce code coutumier lié à la « reprise du sang » et d’envisagé quels sont les moyens potentiels d’échapper à la spirale d’une vengeance meurtrière.  D’autre part, le colloque nous a permit de restituer, par le biais d’un échange entre les intervenants et le public, le visage d’une « autre » Albanie, celle d’un pays et d’une culture foncièrement ancrée dans les valeurs européennes.

En préambule aux préparatifs de ce colloque, Konitza asbl a pris contact avec Professeur Christian Gut[1], traducteur du Kanun en français. En effet il était proposé d’inviter Prof Gut à Bruxelles. Hélas, celui-ci se trouvant dans l’impossibilité de se déplacer a néanmoins aimablement accepté de répondre à quelques questions, devant une caméra, exclusivement pour Konitza. Grâce à Zenel Laci (membre fondateur et secrétaire de notre association) et Shkelqim Aliaj (cameraman et également membre fondateur) nous avons pu partager, en différé, le point de vue de Prof Gut en rapport au Kanun. Nous tenons à remercier aussi Arber Aliaj pour le déplacement effectué à Paris.

Reprise du sang

Suite à l’introduction et à la projection de l’entretien filmé de Prof Gut, nous avons eu le plaisir de partager l’expérience de Nathalie Rossetti et Turi Finocchiaro, réalisateurs du film documentaire : La Bessa de Luce – Au delà de la vengeance, qui relate une incroyable histoire de réconciliation. Ce documentaire d’une valeur exceptionnelle mettait en présence deux familles ennemies impliquées dans un processus de « reprise du sang » ou vengeance. Luce, la mère de l’enfant assassiné, pardonne à Sytky, (l’assassin) le meurtre de son fils. A travers le « Pajtimi » de Luce, véritable rite de réconciliation du sang de sa famille avec celle de l’assassin, nous revivons un moment d’une incroyable densité émotionnelle où les deux familles retrouvent enfin « la paix ». Ce moment de la soirée résonna tout particulièrement auprès des jeunes, présents en grand nombre.

La suite de la soirée fut riche en informations et en analyses. José Sanchez, psychologue social et Directeur de l’asbl Démocratie Plus, fit une analyse psychologique du phénomène, en précisant que la vendetta ne consiste pas en un phénomène circonscrit au seul territoire albanais. Via d’autres exemples, celui-ci démontra que ce type de code traditionnel régit d’autres structures sociales à travers le monde et plus particulièrement dans certains pays du Bassin Méditerranéen. Kolë Gjeloshaj[2], politologue, nous a fournit des éléments de compréhension nécessaire visant à saisir la complexité historique et culturelle de la résurgence de la vendetta dans le Nord de l’Albanie.

Comptait également au nombre des invités David Monfils, avocat au Barreau de Bruxelles, spécialiste en droit des étrangers. Celui-ci nous a instruit des diverses possibilités existant dans le Droit belge, nécessaires à la prise en charge des victimes de la vendetta, cherchant, pour cette raison, asile en Belgique. Toutes ces personnalités de qualités nous ont présenté leur approche personnelle sur ce qu’implique une « dette de sang » et de ce qui en est résulte d’un point de vue pénal, culturelle et sociale. Nous avons appris, entre autre, que certaines familles se voient contraintes de se cloîtrer pour échapper au cycle de la vengeance. Aujourd’hui encore, hélas, le Kanun régit malheureusement la vie quotidienne de trop nombreuses personnes dans diverses régions d’une Albanie fortement marquée par ce code.

Grâce à la qualité des exposés, le public a pris connaissance de l’origine de certaines lois, codes et coutumes albanaises. De même, il lui a été présenté sous divers aspects, les liens qui constituent le processus harcelant initié par le Kanun et à partir de là appréhender une possibilité concrète d’échapper au cycle de la vengeance. C’est dire qu’il s’agit d’informer, sur place ou à distance, et aussi d’agir sur les mentalités. C’est dans une telle perspective que ce colloque a voulu contribuer à l’information d’un public, pour l’occasion majoritairement albanais.

NOS REMERCIEMENTS VONT :
- Aux intervenants, aux organisateurs et autres bénévoles (Milaim, Carol-Anne, Tefik et Xhani…) qui apportèrent à ce colloque leur soutien afin que cet événement se déroule dans les meilleures conditions ; 
- A nos précieux partenaires : Le Service de la Culture de la Commune de Saint-Gilles, Démocratie Plus asbl, et le Service Social juif.communaute francaise

Avec le soutien de la Communauté française.

 

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[1] Professeur émérite à l’Institut national des Langues et Civilisations orientales (INALCO) et à l’Ecole pratique des hautes études (EPHE), membre de L’Académie des Sciences et des Arts du Kosovo, Docteur Honoris Causa de l’Université de Tirana, professeur à l’Université d’Elbasan, ancien Directeur des Archives de Paris, directeur général des Archives de France.

[2] Kolë Gjeloshaj est collaborateur scientifique à l’Institut de Sociologie de l’Université libre de Bruxelles, auteur de l'article « La reprise du sang chez les Albanais » in Confluences Méditerranée, n° 62, Eté 2007.

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