Faik Konitza

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Qui était Faik Konica?

Faik Konica, écrivain majeur et essayiste, est considéré comme l’un des fondateurs de l’identité nationale albanaise. Il était fondateur  et  directeur de la revue franco-albanaise Albania publiée a Bruxelles de 1897 à 1902.

Il est né en 1875 dans la ville de l’Empire ottoman dont il porte le nom (rattachée à la Grèce après les guerres balkaniques de 1912-1913). Il est issu d’une famille patricienne et compte parmi ses ancêtres Ali Pacha de Tepelena. Ce dernier, Vizir de Janina, célèbre à la fois pour son courage et sa cruauté, fut un des héros du poète romantique anglais George Gordon Byron dont il reçut la visite en 1809 dans son palais au cours d’un voyage vers la Grèce.

Par ailleurs, la mère du Pacha de Tepelena  était une descendante de Skanderbeg (1403-1468), Héros national des Albanais et défenseur de la civilisation chrétienne contre l’invasion ottomane. Une statue lui rend hommage depuis 1968 au square Prévost Delaunay, en lisière du  Parc  Josaphat, dans la commune de Schaerbeek.

A neuf ans, Konica quitte sa ville natale pour étudier au collège des Jésuites à Shkodër de 1884 à 1885. Cet enseignement lui apporte une révélation. En effet, comme le notent ses biographes, la découverte de l’Occident est pour cet Albanais, celle de la vraie patrie. En 1902, Konica fera publier à Bruxelles l’Histoire de l’Albanie (Historinë e Shqipnisë) de son ex-camarade du collège des Jésuites de Shkodra, Ndoc Nikaj (1864-1951), fondateur du roman en langue albanaise et l’un des prosateurs les plus populaires avant la Seconde Guerre mondiale.

De sa région natale vers l’ Europe et la Belgique.

Après s’être inscrit dans une école grecque (1885-1886), Konica poursuit ses études au Lycée français de Galata à Istamboul. Il apprend précocement le latin, le grec, l’arabe et surtout le français. Dès la troisième année, il est capable de rédiger des poèmes en français.

En 1892, il vient étudier en France : d’abord au collège de Lisieux, aujourd’hui Lycée Gambier, puis à celui de Carcassonne. En 1894, Konica présente les examens de Français et de Littérature à l’Université de Montpellier. Cette formation française continue à l’Université de Dijon où il obtient le diplôme de bachelier en 1895. Pendant l’année 1896, Konica suit à Paris les cours de sanscrit et d’hindou au Collège de France. On lui offre la possibilité d’enseigner l’albanais à l’Université de Paris mais celui-ci refuse par souci d’indépendance. Quelques années plus tard, sitôt fixé aux Etats-Unis, il obtient aussi le diplôme de Master of Arts à l’Université d’Harvard.

Le premier article d’esprit patriotique du jeune Konica est publié le 26 décembre 1895 dans La Libre Parole de Paris, sous le pseudonyme de Tepeleni. Intitulé “L’Albanie et les Turcs”, il dénonce la duplicité de la politique ottomane et condamne les moyens utilisés pour briser les aspirations à la liberté. Conscient de l’indifférence des nations occidentales, Konica met à profit son séjour en France pour tirer les Etats européens de leur inertie et réfuter les campagnes de propagande du Sultan. A cette époque, son militantisme s’est déjà étendu à la politique : il publie sous divers pseudonymes des pamphlets contre l’oppression ottomane et la complaisance des puissances européennes à l’égard de cet Empire finissant.

Dès ce moment, il commence à penser au projet d’une revue franco-albanaise. Entre temps, un ami artiste lui indique qu’à Bruxelles tout coûte moins cher qu’à Paris, comme l’impression de la presse écrite.

Konica à Bruxelles.

Konica arrive à Bruxelles à la fin de l’année 1896 et s’installe dans une maison de la rue d’Albanie à Saint-Gilles. Il commence aussitôt à travailler à l’élaboration et à la publication de sa revue. Il la nomme Albania, tout simplement. Le premier numéro sort  le 25 mars de l’année 1897. Des amis albanais à Istanbul soutiennent la revue financièrement, ce qui permettra à Konica de la diriger depuis Bruxelles et, plus tard, Londres.

Quel était le programme de la revue Albania ?

Conservation et développement de l’individualité nationale. Culture de la langue, en tant qu’ expression de cette individualité. Amélioration des conditions économiques qui permettent à l’individualité nationale de se maintenir entière, forte et libre. Littérature, folklore, linguistique, histoire et nouvelles.

De fait, aussi bien l’ambition du programme que la durée d’existence (12 ans), démontre qu’Albania a vraiment été une revue encyclopédique. A l’époque, Guillaume Apollinaire  l’a d’ailleurs comparée à la revue française “L’Occident” et l’a considérée comme le plus grand monument de la culture albanaise. Aujourd’hui, les chercheurs en Albanie et dans le monde s’accordent à dire que la revue Albania a été la plus prestigieuse des publications de la Renaissance nationale albanaise.

Son contenu va des questions nationales et politiques aux problèmes d’une langue albanaise autonome et unifiée, dotée d’un alphabet fixe, en passant par les débats, les essais, la critique littéraire, les traductions, les textes poétiques, etc. Konica rédige en albanais et français la plupart des textes qui illustrent la diversité de ses talents, la qualité de son expression et son érudition. Il s’occupe de politique et, plus encore,  de littérature, d’histoire, de philologie. Il a ainsi apporté un souffle neuf au mouvement albanisant. En purifiant la langue albanaise des termes impropres ou parasites, Konica transforma, en peu d’années, un patois mal dégrossi en une langue belle, riche et souple.

La revue publie aussi, en version albanaise et parfois française, des textes littéraires d’écrivains albanais renommés et de la tradition nationale (chansons de geste, contes, poèmes, proverbes).

Les collaborateurs et le contenu de la revue “Albania”.

La collection d’Albania est réunie en 12 volumes qui font 2500 pages. Ses collaborateurs étaient des écrivains et intellectuels réputés de son temps en Europe comme Guillaume Apollinaire, Emile Legrand, Jan Urban Jarnik, Holger Pedersen, Albert Thumb, Théodore Ippen, etc.

Albania a ouvert ses pages aux œuvres de Homère, Aristote, Hérodote, Virgile, Shakespeare, Cervantès, Walter Scott, La Fontaine, Montaigne, Ronsard, Goethe, Hugo, Schopenhauer, etc. La revue était diffusée en Albanie et dans les diasporas albanaises : à Bruxelles, Londres, Paris, Vienne, Trieste, Venise, Athènes, Le Caire, Istanbul, etc.

Konica, l’ homme qui a mis en danger l’Empire ottoman.

Faik Konica publie sa revue avec grand soin. Les articles sont souvent anonymes ou signés par lui et ses collaborateurs sous des pseudonymes variés. Il se doit par ailleurs de ne pas compromettre sa famille restée à Istanbul…Condamné à mort (par contumace) par la Sublime Porte, il n’en devient que plus populaire auprès de ses amis européens. Une fois dénoncé par les autorités turques, Konitza est victime de tracasseries policières à Bruxelles. Dans une note du 13 août 1903, l’Ambassade ottomane avertit le ministre des Affaires étrangères belge de la condamnation subie par Konitza. Dès ce moment, celui-ci songe à quitter la Belgique et s’installer à Londres où il séjourne six ans.

Après l’interruption de la revue Albania, en 1909, il partira pour les Etats-Unis, invité par ses compatriotes à animer les organisations et les journaux albanais soutenant l’indépendance et la création du nouvel Etat d’Albanie.

De 1909 à 1912, il dirige ainsi les journaux Dielli (le Soleil), Trumpeta e Krujes (La Trompette de Kruje) ainsi que la Fédération Vatra (l’Union des associations de la diaspora albanaise des Etats-Unis). Konica participe à la Conférence des Ambassadeurs de Londres (1913) et au Congrès de Trieste (1913) pour prévenir le démembrement de l’Albanie voulu par les Etats balkaniques voisins. Pendant la Première Guerre mondiale (1914-1918), il s’engage auprès des chancelleries étrangères défendant l’intégrité de son pays, devenu champ de bataille entres les différentes puissances en conflit.

En 1921, Konica est élu président de la Fédération Vatra et soutient la consolidation de l’Etat albanais. Il assure la fonction de représentant diplomatique du Royaume d’Albanie à Washington de 1926 à 1939. Konica meurt le 15 décembre 1942 à la suite d’une hémorragie cérébrale.

Ecrivain, journaliste et essayiste brillant, Faik Konica est l’un des fondateurs de la langue et de la littérature modernes albanaises. Il est auteur des essais littéraires, linguistiques et des œuvres en prose. Son roman, Dr Gjëlpëra découvre les racines du drame de Mamuras (1924) dissèque impitoyablement la vie psychosociale de l’époque en Albanie. Avec son essai La chronique des lettres albanaises (1906), Konica jette les bases théoriques de la critique littéraire albanaise en donnant des modèles contemporains inspirés par la littérature et la  culture européenne. Européaniste convaincu, Konica fait partie de l’avant-garde des intellectuels albanais qui a oeuvré sans relâche pour le retour de l’Albanie à l’Europe et à ses racines, après une longue et tragique histoire d’isolement par les dominations étrangères.

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